Pierre Forté travaille sur des vélos à hydrogène innovants.
Cyrille PITOIS.
Le vélo à hydrogène, déjà en circulation à Saint-Lo, et bientôt à Cherbourg, se recharge sur une borne dédiée. En 2020, il s’en passera, grâce à l’innovation signée Pragma à Biarritz.
Dans la cour de sa petite usine de Biarritz (Pyrénées-Atlantiques), Pierre Forté, PDG de Pragma industries, ne boude pas son plaisir. Faire essayer le premier vélo électrique propulsé par une pile à hydrogène, c’est voir s’écarquiller les yeux du cycliste amateur.
Sur le vélo Alpha, pas de batterie. Du moins pas comme celles que l’on connaît. La pile à hydrogène est bien cachée dans le cadre. En une poignée de secondes, grâce à une connexion sur la borne ad hoc , elle est rechargée.
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Idéal pour circuler sur des périmètres spécifiques comme des entreprises, sur des campings… En plus de ceux déjà testés à Saint-Lô et d’autres attendus à Cherbourg en 2018, les vélos seront bientôt entre les mains d’une dizaine de personnes à Pamiers (Ariège), d’une quinzaine d’utilisateurs à Chambéry (Savoie) et presque autant au service de l’agglomération du Pays Basque.
« Depuis 2016, dix prototypes fonctionnent dans un centre de recherches à Versailles(Yvelines). Avec ce déploiement dans différentes villes ou entreprises, on va savoir comment ça marche », prévoit Pierre Forté, qui pédale déjà vers l’étape suivante.
Les six salariés de Pragma sont désormais concentrés sur la pile à hydrogène qui va se passer de la borne de recharge. Le principe : un sachet d’oxyde de magnésium et d’aluminium jeté dans l’eau permet de casser la molécule d’eau pour isoler l’hydrogène et obtenir la source d’énergie. Le process est déjà commercialisé par Pragma à des fins militaires sur des générateurs nomades, destinés à alimenter du matériel électrique ou électronique.
Un transport décarboné
« L’objectif est de produire, en 2020, 5 000 vélos qui pourront s’affranchir du rechargement en borne. Chaque capsule produit l’énergie pour 150 km d’autonomie »,dévoile Pierre Forté. Le vélo restera haut de gamme, et coûtera autour de 4 000 € la pièce. « Mais il apportera une vraie solution innovante de mobilité, complètement détachée des énergies fossiles. »
En 2020, 3 à 4 millions d’Européens chercheront à acquérir des vélos électriques. Tous n’investiront pas cette somme. « Mais proposer un moyen de transport complètement décarboné avec un impact immédiat, à la fois sur la circulation et l’environnement, va répondre aux attentes d’une partie de la population », estime Pierre Forté. Ses espérances sont partagées : en lançant une levée de fonds pour espérer mobiliser les 800 000 € nécessaires au développement du produit, il a finalement récolté 1,5 million d’euros.
Les cadres en aluminium sont importés depuis l’Asie. Le montage est réalisé sur un site Michelin en France, avec un système électronique produit en Gironde, un stockage d’hydrogène fabriqué dans la Drôme, une bouteille qui vient d’Italie et un moteur allemand.
Pierre Forté imagine déjà la suite : adapter l’autonomie et la souplesse de la pile à hydrogène à un triporteur, un scooter, un drone ou des outils médicaux… Et surtout, devenir équipementier pour d’autres marques de cycles. « Faire des vélos n’est pas notre métier. »