Si l’usage du vélo progresse dans les grandes villes, et notamment à Strasbourg qui fait figure de leader, la bicyclette reste un moyen de transport marginal, victime de nombreuses idées reçues.
« Prendre un vélo pour aller travailler ? Mais c’est beaucoup trop loin. » En France, un salarié sur deux travaille à moins de 8 km de chez lui, selon l’Insee. Le vélo étant souvent le mode de transport le plus efficace pour les trajets compris entre 500 m et 10 km, comment se fait-il qu’il n’y a toujours guère que 3 % des Français à s’en servir sur des trajets quotidiens ?
Ne nous trompons pas : il ne s’agit pas de faire rouler 50 % des salariés à vélo. Mais alors que le coût au kilomètre d’un vélo représente presque moitié moins que celui d’une voiture (15 centimes d’euros contre 27 selon une étude de la Fnaut), pourquoi est-ce si difficile d’atteindre ne serait-ce que 5 % dans certaines villes, là où Bergame (Italie) est à 6 %, Strasbourg, maillot jaune français à 14 % et Bâle (Suisse) à 20 % ? Sans parler du fait qu’il s’agit d’un moyen de transport qui ne pollue pas, alors que la France a connu cet hiver un pic de pollution historique aux particules fines.
« Un truc d’écolo »
Les cyclistes vous le diront. Il suffit d’aborder le sujet au bureau ou lors d’un repas de famille pour entendre une pléiade d’idées reçues sur la pratique du vélo. Dans un ouvrage qui vient de paraître ( « Le pouvoir de la pédale » , éd. Rue de l’échiquier), Olivier Razemon, journaliste spécialiste des transports, se livre à un recensement et à un démontage méthodique de ces clichés, y compris du vélo « pour écolo », ou pire, « pour bobo », qui en règle générale, est utilisé pour mettre un terme définitif au débat. « Ces caricatures, au fond, révèlent une certaine jalousie, écrit Olivier Razemon. Le cycliste est rapide, dépense peu d’argent pour se déplacer, il entretient son corps. Il ne donne pas toujours des leçons de morale ; il est une leçon de morale ».
Pas sérieux
Voiture du pauvre, monture de sportif voire de kamikaze urbain, le vélo est surtout bien moins neuf et reluisant qu’un nouveau tramway. C’est là son autre difficulté : il n’est pas pris au sérieux, analyse Olivier Razemon. De fait, les investissements consacrés n’étant pas conséquents (à l’exception du coût des systèmes de vélos en libre-service), il ne peut donc s’agir de quelque chose d’important. Les élites françaises ne s’y sont pas trompées, « elles ne se déplacent pas à vélo », observe Pierre Toulouse, adjoint au Monsieur Vélo au ministère des Transports.
Parmi les élus, tous ne voient pas, une fois la nouvelle piste cyclable inaugurée, l’intérêt du vélo comme mode de transport à part entière (lire ci-dessous, les difficultés à instaurer une indemnité kilométrique). Faudra-t-il un mois de circulation alternée pour y revenir ? Au vu des contraintes financières qui pèsent sur les collectivités et les réseaux de transports collectifs, le vélo pourrait bien ne plus être une option, mais une priorité