Le parcours professionnel de Swanee Ravonison a évolué. Finie, la boutique la Fée du vélo à Nevers. En 2020, elle devient la seule femme cadreuse de France dans son atelier Pariah, toujours place Chaméane à Nevers.
Le vélo et Swanee Ravonison, c’est une histoire de passion. La jeune femme ouvre son magasin la Fée du vélo en 2014, place Chaméane à Nevers. Elle vend des vélos, des accessoires. Mais surtout, elle les répare, les entretient.
« Un jour, en réfléchissant avec un copain à la manière de louer des vélos de manière originale, j’ai dit pour rigoler : "On n’a qu’à les fabriquer" », explique la cycliste chevronnée. Et puis, la blague a fait son chemin.
Je suis la seule femme à fabriquer des cadres de vélos artisanalement en France. Et je sais depuis peu que je suis également, pour le moment, la seule cadreuse artisanale noire dans le monde
L’idée de retourner à l’école pour apprendre la soudure ne l’emballe pas. Des recherches sur la Toile la conduisent au Danemark chez OTM Bike. Tom est cadreur et formateur. Et Bourguignon de surcroît.
« Étant donné que je suis une femme, il a divisé par deux le coût de ma formation. D’ailleurs, je suis la seule femme à fabriquer des cadres de vélos artisanalement en France. Et je sais depuis peu que je suis également, pour le moment, la seule cadreuse artisanale noire dans le monde », s’amuse-t-elle.
Je me suis entraînée à fabriquer mes premiers vélos pour moi et ma famille.
« Nous devions être trois stagiaires à Copenhague, les deux autres se sont désistés. En une semaine, il m’a montré tous les process. J’ai choisi et appris le brasage car j’aime bien le travail à la flamme et je trouve la finition plus belle. »
De retour à Nevers, celle qui pédale depuis l’âge de 6 ans s’équipe d’un chalumeau, d’une scie cloche et circulaire. « Je me suis entraînée à fabriquer mes premiers vélos pour moi et ma famille », rapporte Swanee Ravonison.
En 2016, le magazine trimestriel 200, orienté sur l’aventure cycliste dans sa globalité, relance le Concours de machines qui met en concurrence des cadreurs artisans fabricants de vélos. « 200 me demande de participer en tant que débutante cadreuse. N’ayant pas encore le matériel adéquat, j’ai sollicité tous les cadreurs de France, une trentaine en tout, pour qu’ils me laissent leur atelier un gros week-end pour construire mon vélo », raconte la jeune cadreuse.
La marque de vélo Cyfac, près de Tours, répond favorablement. La cycliste auxerroise Élodie Palvassier, amie de Swanee, accepte de piloter. La seule équipe féminine termine septième sur quinze.
« J’ai ensuite participé en 2017 et 2018 en tant que constructrice et pilote, je ne sais pas à quelle place j’ai fini car, désormais, seul le premier est divulgué. Mais c’est surtout un grand Salon pour se rencontrer, voir les machines et que les gens découvrent les artisans cadreurs. »
Une quinzaine de vélos
À partir de 2018, l’artisane cadreuse de Nevers décide d’ouvrir son carnet de commandes. Martine et Jean-Pierre Durand sont ses premiers clients. Les cyclotouristes neversois veulent « un dernier vélo artisanal haut de gamme, fabriqué à leurs mesures, confortable et personnalisé. C’est une collaboration, c’est ça qui me plaît », note la professionnelle.
En matière de temps, la double activité avec la boutique la Fée du vélo devient difficile. En 2020, Swanee Ravonison arrête le magasin et le nom la Fée du vélo. Et lance l'atelier Pariah création sauvage. L’unique cadreuse française a déjà fabriqué une quinzaine de vélos. Actuellement, elle travaille à la réalisation d’un VTT, un pignon fixe complet et deux cadres.
200. Swanee Ravonison collabore à 200 depuis les débuts du magazine en 2014. Elle écrit des chroniques trimestrielles, raconte sa vie de cadreuse et teste des vélos comme le « tall bike », l’intrigant deux-roues qu’elle a fabriqué et qu’elle enfourche, perchée à 1,50 m « pour voir la vie d’en-haut ».
« Le summum du pratiquant est de fabriquer son vélo »
Fin mai 2020, la boutique de vente et réparation de vélos la Fée du vélo, place Chaméane, s’est transformée en atelier de fabrication de cadres de vélo. Swanee Ravonison consacre désormais tout son temps à sa marque : Pariah (avec un H, comme en anglais). « Pour moi, le summum du pratiquant est de fabriquer son vélo. Si j’avais su que c’était possible, je l’aurais fait du départ », formule la cycliste passionnée.
J’aimerais qu’on croise plus de filles noires à vélo pour qu’elles s’identifient, qu’elles n’hésitent pas à s’y mettre et changer l’image des femmes racisées.
Pourquoi ce nom ? « Parce que le vélo sur la route, c’est celui qu’on ne veut pas. Un paria, c’est aussi celui qui se différencie et en tant que femme noire, je reste ultra-minoritaire dans la communauté cycliste. C’est pour effacer le côté péjoratif de ce mot. J’aimerais qu’on croise plus de filles noires à vélo pour qu’elles s’identifient, qu’elles n’hésitent pas à s’y mettre et changer l’image des femmes racisées », confie-t-elle.
Le pignon fixe, son préféré
« J’ai pour but de vendre les propres vélos de ma marque que j’aurai pensés et construits de A à Z en trois tailles, 50/52 et 54 », lâche-t-elle.
Pour l’instant, la spécialiste ne travaille que sur commande et réalise du sur-mesure, adapté au plus juste à la morphologie, à la pratique et aux besoins des clients. Les cadres sont en acier brut « car c’est solide, confortable et facile à réparer. »
Le pignon fixe a sa préférence pour son côté minimaliste « et parce qu’il demande très peu d’entretien ». La confection d’un cadre représente environ une semaine de travail, auquel il faut ajouter une journée de montage.
Comptez autour de 3.500 € pour un vélo complet, type randonneuse, vélo de course ou de grandes distances et 2.500 € pour un pignon fixe.
Contact. Cette adresse e-mail est protégée contre les robots spammeurs. Vous devez activer le JavaScript pour la visualiser. ; site internet.
Dominique Romeyer